lundi 29 juin 2015

Maturité, maturité, j'ai une gueule de maturité?

Le problème avec les adolescents de nos classes, c'est qu'ils sont grands. Genre, ils commencent à avoir une personnalité, une réflexion, un sens social, civique et moral de leurs responsabilités. Mais ils sont aussi des gamins. C'est justement le principe.
Et ils n'aiment pas qu'on le leur dise. Par exemple, en vie de classe:

Kevin: Madame, la prof d'EPS elle fait de la discrimination envers les garçons!
Mme Mélu: Explique-moi ça Kevin.
Kevin: Ben elle arrête pas de dire qu'on est trop immatures! Qu'on est trop des gamins! Alors déjà, on est tous des gamins, même les filles, et en plus c'est pas en nous disant qu'on l'est qu'on va progresser!

Alors cher Kevin, comment te dire? Rire grassement pendant tout le cours, lever la main pendant un quart d'heure pour être sûr que toute la classe va entendre la stupidité que tu prévois sciemment de dire, essayer d'attraper les filles en cours de sport, s'enfermer dans les vestiaires pour pas que le prof vous trouve et se mettre des mandales "pour rigoler", tu vois, je n'appelle pas ça ni de la maturité, ni du sérieux en vue d'une progression.
(on me souffle dans l'oreillette que certaines de ces accusations pourraient s'appliquer aussi à un public masculin plus âgé, mais je refuse de souscrire à de tels marques de désespoir).

Oui, c'est vrai, ils aiment bien êtes responsabilisés, être traités comme des grands. Mais pas des trop grands non plus.

Kevin: Madame, il faut mettre un petit chapeau sur le "u" dans "nous fûmes"?
Mme Mélu: Un quoi?
Kevin: Ben, un petit chapeau...
Mme Mélu: Tu parles de l'accent circonflexe?
Kevin: Oui, voilà.
Mme Mélu: Tu te rends compte que tu vas passer en seconde? Evite parler de "petit chapeau" devant des lycéens, on ne sait jamais... Au passage, oubliez aussi les "trois petits points". Ce sont des points de suspension, et ils ne sont pas plus petits que les autres!

Et oui, la maturité grammaticale, ça a aussi de l'importance.

Mme Mélu: "L'élève apprend son cours" / "Le cours est appris par l'élève". Il y a une phrase à la voix active, l'autre à la voix passive ...
Kevin: Madame, c'est pas comme avec le chat et la souris?
Mme Mélu: Si mais...
Kevin: Ah mais je connais en fait! "Le chat mange la souris"/"La souris est mangée par le chat".
Mme Mélu: J'aimerais autant qu'à deux semaines du brevet, on puisse se passer d'exemples pris dans des comptines enfantines.
Kevin: Ben c'est plus facile!
Mme Mélu: Déjà, non. Et en plus, c'est trompeur, car il existe des tas de situations bien moins faciles avec lesquelles il faut se familiariser. En grammaire aussi, il faut évoluer...
Benoit: Oh ça va, on n'est pas des pokémon...
Kevin: Ah ouais, moi je suis Pikachu!
Brenda: Moi, Dracaufeu!
Brian: Et moi, Bulbizarre! Bulbi, bulbi...

Je vous laisse imaginer la fin de ce cours qui a dégénéré en  onomatopées étranges.
J'imagine donc que mes élèves ont leur propre maturité. Leur propre définition de la chose, en tout cas. Ainsi, comme le dit très bien Kevin:

"Madame, quand on dit que les garçons sont meilleurs que les filles au foot, c'est pas du machisme. C'est juste de la maturité sportive!"
La maturité adolescente à l'échelle de toute une époque.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

ils vivent sur leur propre planète je pense

Unknown a dit…

Dracaufeu*

Signé : Une collègue de SVT fan de Pokémon et de vos textes :)

Unknown a dit…

Dracaufeu*

Sugné: une collègue de SVT fan de Pokémon et de vos textes :)