lundi 23 septembre 2013

Brève de salles des profs

Cette année, j'ai un collègue presque aussi théâtral que moi, ce qui n'est pas peu dire quand on me connaît.

Le problème, c'est qu'il m'a grillée. Forcément, il a l'oeil.

Il a tout de suite remarqué l'application avec laquelle j'assortis la couleur de mon eye-liner avec celle de ma veste ou encore mes boucles d'oreilles avec mon vernis à ongle. 

Non, pas superficielle! THE-A-TRALE. Nuance.

Le souci c'est qu'il a embrayé sur le fait que lui, quand il s'est habillé ce matin, l'a fait avec son gamin cramponné à la jambe, probablement demandeur d'une affection très méritée (ou avec la ferme intention de pourrir la vie de son prof de paternel, ce qui revient sensiblement au même quand on mesure moins d'un mètre). 
Le costume impeccable qu'il arborait n'en a que plus de mérite, je le reconnais.

Du coup, je suis non seulement devenue la prof assortie sur tous les petits détails au point de flatter le sens esthétique de ses collègues, mais en plus celle qui a le temps le matin de manier le pinceau pour tracer des arabesques sur ses yeux ou laquer ses ongles en rouge les dimanche après-midi.

Je crois qu'ils vont m'attendre au tournant pour le jour où je vais arriver en jean-basket par accès de flemme.

Mais je voudrais vous y voir, vous: les élèves passent cinquante-cinq minutes à me détailler des pieds jusqu'à la tête. 
Je suis une mauvaise prof: je me sers de mon apparence pour capter l'attention des élèves.
C'est vrai, autant leur donner quelque chose à regarder.

N'empêche, ça fait un cours qui sort de l'ordinaire. Et puis, j'endosse mon costume de travail. Certains ont des uniformes, d'autres des blouses. Moi, j'ai mon attirail de littéraire excentrique. Je ne trompe pas sur la marchandise. 

Et puis sérieusement, vous en trouverez, vous des profs qui vous font des cours de littérature habillés subtilement sur le thème Harry Potter ou Oliver Twist. Ca met dans l'ambiance! Je persiste et signe.

THE-A-TRALE.

Ce qui me rappelle que depuis ma visite au Making Of Harry Potter, je dispose pour accompagner ceci...

De ceci:


Dans ma recherche d'une identité visuelle excentrique ET culturelle. Et THE-A-TRALE.

lundi 16 septembre 2013

Faut pas nous la faire!

On peut être en 6ème et avoir déjà l'esprit critique bien affuté, pour ne pas se laisser abuser par les contes de fée de nos ancêtres ou les tentatives culturo-spirituelles vaines.

Prenez justement "Les Fées", de Charles Perrault. L'histoire d'une pauvre fille maltraitée par sa soeur et sa mère, qui croise une fée près d'une fontaine et qui se montre si bonne et si douce avec elle que la fée la récompense en lui offrant le don qu'à chaque parole prononcé, il lui sorte de la bouche une fleur ou une pierre précieuse. Chassée par sa mère, elle rencontre un Prince à qui elle raconte son histoire, qui tombe amoureux d'elle et l'épouse. Happy End.

Zoé, onze ans: "Ouais, enfin... Il a quand même attendu qu'elle lui crache des pierres précieuses et des perles pour tomber amoureux, hein. Alors amoureux..."

Bravo, Zoé. Tu iras loin dans la vie.
Surtout en apprenant à remettre à sa place les mauvaises profs qui se croient drôles.

Prof pleine d'entrain: "Et vu que l'histoire commence à partir de "cette année-là", on encadre les mots "Cette année-là" [à prononcer avec une petite voix nasillarde et un rythme disco bien sûr, ndlblogueuse]"

Aucune réaction des élèves.
Prof pleine de suffisance: "Il faut que j'arrête de faire des blagues, vous ne les comprenez pas..."
Zoé, qui ne perd pas le nord: "Ben si madame, on a compris, mais on va pas rire pour ça quand même..."


lundi 9 septembre 2013

Il faut un début à tout...

Le fait d'être une nouvelle prof de l'établissement me rend encore plus mauvaise que d'habitude.
Il y a d'ailleurs quelques petits trucs qui m'agacent prodigieusement dans ma situation de petite nouvelle.

"Madame, c'est par où l'entrée du terrain de sport?
- C'est par là je pense...
- Non, c'est par là, M'dame, là-bas c'est le parking".

"Et donc on se revoit demain, à 14h...
- 13h30 vous voulez dire, m'dame.
- Hein?
- Ben les cours commencent à 13h30 l'après-midi.
- Ah oui, c'est vrai..."

Et surtout:
"C'est quoi ce bruit?
- La sonnerie, m'dame!"

Ah. La sonnerie. Dans mon nouveau collège, la sonnerie, c'est une musique. Une petite musique sud-américaine, avec percussion et paroles. Balancée à fond dans tous les hauts-parleurs dont celui placé précisément DANS la salle des profs découlant probablement d'une sorte de propension professorale à faire durer la récréation.

Du coup, pensez bien que la première fois que je l'ai entendue, je me suis demandée où était le concert.

Ah et vous la voyez, là, la prof devant sa salle qui danse et se déhanche en attendant ses élèves? C'est moi.

Et oui, faut pas me donner des joujoux.

mercredi 4 septembre 2013

A Brave new world

Cette année, j'ai décidé d'expérimenter une des péripéties du métier d'enseignant que je n'avais pas vécue : j'ai changé d'établissement.
Péripétie, je pèse mes mots, car la mutation relève d'un véritable parcours du combattant.

Petit cours d'arithmétique: chaque poste de professeur "coûte" un certain nombre de points. Plus le poste est demandé, plus il faut de points pour le décrocher. Vous suivez?
Pour avoir des points, il y a plusieurs manières: l'ancienneté, le rapprochement familial, l'échelon, ...
En bref, pour faire grimper tes points au maximum, il faut:
- être depuis dix ans dans le même bahut
- vivre à deux cents kilomètres de ton conjoint
- ...depuis cinq ans
- avoir trois enfants dont un handicapé
- être volontaire pour aller dans un bahut pourri où personne veut aller.
- être copain comme cochon avec l'inspecteur (en désespoir de cause)

Là, tu peux peut-être tenter Paris intra-muros. Sinon, il va falloir calculer. Parce que les points nécessaires pour obtenir un poste varient en fonction de la demande. Tout le monde veut muter? Les points chutent! Personne bouge? Pas de place et les points grimpent. Création de poste? Alleluia! Suppression de poste? Aie aie aie, c'est pas cette année que tu bougeras... Parce que celui dont le poste a été supprimé, on le console en lui donnant mille point d'avance. Donc c'est pas avec tes pauvres petits 30 points d'ancienneté que tu te la couleras douce dans le bahut de tes rêves.
Mais bon, quand faut se lancer....

Après il y a deux cas de figure: 
Soit tu ne changes pas d'académie (ces groupes de département qui forment le système scolaire français).
Dans ce cas, en mars, tu peux déposer ta demande sur le site internet en faisant tes voeux. Après tu attends, cool Raoul, parce que au pire, si ta demande est pas satisfaite, tu gardes ton poste actuel et tu fais subir ta frustration à tes collègues toute l'année au point qu'ils font partir quelqu'un en retraite anticipée dans le bahut voisin pour que tu prennes sa place.

Soit tu changes d'académie. Et à ce moment-là, mieux vaut savoir anticiper.
En novembre, tu peux déposer ta demande sur le site internet en faisant tes voeux. Et après, tu attends mars pour la réponse.
Si la réponse est positive, félicitations, tu es déjà dehors. Déjà s'ouvre la phase pour ceux qui ne changent pas d'académie et déjà, les gens peuvent postuler sur TON poste.Toi, tu fais tes voeux dans ta nouvelle académie MAIS pas cool Raoul du tout car comme tu es déjà dehors, si on ne peut pas satisfaire tes voeux, on ne te renvoie pas dans ton académie: on t'envoie où il y a de la place. Donc vaut mieux pas se louper, et bien avoir réfléchi avant de dire "je me barre de cette académie".

Et histoire de simplifier les choses, les points se répartissent différemment suivant le type de voeu que tu fais. Petit exemple:
Tu rêves du collège de Poudlard. Il faut 150 points pour l'obtenir.
Tu demandes le collège de Poudlard. Tu n'as que 40 points (parce que tes cinq ans d'exil (cf plus haut) ne sont pas pris en compte pour ce type de voeu). Tu ne l'as pas
Tu demandes n'importe quel établissement sur le groupement de commune où se situe la commune du collège de Poudlard. Tu as 200 points. Tu l'as. 
Ah oui mais quelqu'un qui avait 200 points aussi a demandé aussi le collège de Poudlard et lui, ses points sont pris en compte sur le voeu précis. Ah ben non, tu l'as pas. Tu as le collège d'à côté. Et bien les boules.


Oui, je sais, c'est pas clair. D'où des heures passées à explorer et vérifier tous les documents, petites lignes, pièces justificatives pour être sure que mon dossier soit complet et irréfutable.


Mais pour ma part, une bonne fée s'est penché sur mon berceau (ou, pour citer mon ex-collègue d'espagnol, j'ai "un cul bordé de nouille"), j'ai réussi à obtenir un collège ultra bien situé et neuf. NEUF genre c'est sa deuxième rentrée en tout et pour tout.
Genre il est tout propre, ya RIEN d'écrit sur les murs ni sur les tables.
Genre les stores électriques MARCHENT! Et ils sont électriques (genre t'appuie sur le bouton, et ils se ferment tout seuls pour que tu puisses séparer Kévin et Bryan qui se battent)!
Genre quand je rentre dans la salle, la lumière elle s'allume toute seule.
Genre ya des ordinateurs et des vidéoprojecteurs dans TOUTES LES SALLES.
Et dans la mienne, ya même UNE IMPRIMANTE!
Genre on fait l'appel sur l'ordinateur et ça envoie à la vie scolaire sans passer par les maudits cahiers d'appel ou petite fiche de naze.

...

Genre les étagères du CDI sont complètement vides.
Genre ya pas assez de manuel pour les élèves alors pour les profs n'en parlons pas.
Genre ya même pas de fauteuil en salle des profs, ya que quelques chaises contre les murs.
Genre ya même pas les numéros des salles sur les portes, c'est encore les codes de l'architecte (et c'est pas simple quand on est une pauvre petite prof de français fâchée avec les chiffres).
Genre les bus, ils savent pas encore que le collège est là, alors ils y vont pas.
Genre ya un super "plateau" (moi j'appelle ça un stade, quand ya un terrain de sport de ballon entouré par des couloirs pour courir, mais apparemment non) tout joli avec des marques au sol qui brillent tellement elles sont neuves... mais ya pas encore de gymnase ni de vestiaire et que quand il pleut, on fait EPS dans la salle polyvalent qui fait aussi amphi.


Un monde nouveau auquel s'adapter!

Dès demain, je rencontre mes nouveaux élèves. 
J'ai hâte.